Le rêve d'Italie
Cézanne n'a jamais mis les pieds en Italie. Pourtant sa Provence natale en est si près et ses paysages en sont si proches et la cuture méditerranéenne si prégnante que Cézanne ne pouvait pas ne pas être influencé par la peinture italienne qu'il côtoyait aussi dans les ouvrages d'art et les musées, musée d'Aix-en-Provence, musée du Louvre. Comme beaucoup de ses contemporains, il était aussi imprégné de culture latine et lisait dans le texte les auteurs latins. L'exposition qui lui est consacré au musée Marmottan-Monet, le MMM consiste à regarder son œuvre à travers l'influence italienne, celle sensuelle des peintres vénitiens, âpre des peintres napolitains et classique des peintres romains dans lesquelles on peut classer Nicolas Poussin, le grand peintre classique français mort à Rome après y avoir exercé son art pendant plus de 40 ans.
L'exposition s'ouvre sur Cézanne et les peintres vénitiens en nous recommandant de la regarder avec l'œil du peintre qui au delà du sujet qu'il peint s'intéresse à la peinture, à sa texture, sa luminosité, sa composition.
La première comparaison se fait sur ses deux tableaux. Les deux sujets sont évidemment très différent puisque l'un est un sujet profane et l'autre un sujet religieux. Pourtant l'influence du Tintoret se fait sentir à la fois dans le choix des couleurs et les masses rouges, bleues, vertes, blanches, ocres et dans la composition avec les deux diagonales celle de l'échelle et du corps du Christ aboutissant à la Vierge évanouie et celle du bras du christ qui suit la courbe du paysage pour le tableau du Tintoret. On retrouve ces masses et ses teintes dans le tableau avec des inversions par exemple les rouges se retrouvent en haut du tableau chez Cézanne alors qu'il sont en bas chez le Tintoret, il y a la même inversion au niveau des diagonales du tableau. Cézanne n'est jamais dans la copie, ni dans l'imitation, il est plus dans l'imprégnation,.
La comparaison suivante se fait avec le Greco. On sait que Domenico Théotokopoulos, né en Crète est passé par Venise avant de faire carrière en Espagne.
Ce que nous propose de voir l'exposition, en dehors de la composition bipartite classique dans les œuvres religieuses pour séparer le céleste et le divin du terrestre, outre la différence d'orientation du triangle de répartition des personnages : apôtres d'un côté et adorateurs de l'autre. Posé sur sa base chez le Greco et pointant vers Jésus et posé sur la pointe chez Cézanne et s'élargissant vers le ciel où apparait l'être suprême,
c'est l'usage de la couleur pour construire l'espace typique de l'art vénitien auquel se rattache Le Greco.
Ainsi l'usage des teintes mordorés dans le bas des deux tableaux - draperies des apôtres et projections lumineuses qui tremblent sur le sol sous les pieds des adorateurs - donnent à la fois un effet de profondeur et conduisent le regard vers le haut du tableau. De mêmes les teintes rosées ou rouges complètent cet effet ascensionnel, vers Jésus chez le Greco et vers l'être suprême qui domine l'épiphanie chez Cézanne..
L'exposition ensuite se fait moins pédagogique et c'est à nous avec ce regard éclairé qui nous est donné au début de faire nos comparaisons et de déceler les influences.
Ici par exemple on voit comment l'usage de l'ombre et de la lumière définissent à la fois l'atmosphère de la scène et la profondeur du paysages. Même composition avec la masse lumineuse du rocher qui s'impose au second plan chez Rosa et celle de l'arbre au tronc illuminé de soleil chez Cézanne avec une lumière qui vient de la gauche.
(Salvator Rosa est un artiste complet napolitain du 17ème siècle : à la fois poète, acteur, musicien, graveur et peintre)
Je vais vous laisser un peu seul déambuler dans cette exposition virtuelle.
(Jusepe de Ribera est le grand peintre napolitain du XVIIème siècle)
D'autre œuvres sont présentées dans l'exposition concernant l'influence des maîtres italiens chez Cézanne.
La deuxième partie est consacrée à l'influence de Cézanne sur les artistes italiens du Novecento. Je vous en présenterai une partie dans un prochain article.