Le renard plaidant sa cause

Je suis le renard roux et ma queue à panache
Importune les chasseurs qui veulent ma peau.
Leur droit de chasse que fort impertinent je gâche
Est bafoué, disent-ils, par mes terribles crocs.
Et devant le préfet, ils réclament pour moi
La peine de mort pour réparer l’injustice
Que je leur ai faite en attrapant dans les bois
Les proies qu’ils convoitent ; c’est, pour eux, vrai supplice.
Le préfet les écoute et décide ma mort
Sans m’accorder le droit de plaidoyer ma cause
Et cette sauvage innocence qui ne mord
Que pour se nourrir, se cache et à peine ose
Grapiller quelques poules grasses et replètes
Laissées par mégarde à la portée de mes dents.
Au fond je ne leur enlève rien et la fête
Gourmande est autant pour eux que pour moi, vraiment !
De plus je n’ai que modestes pattes et gueule
Pour attraper mon repas et calmer ma faim
Et celle de mes douces filles, laissées seules
Au terrier pendant que je course le lapin.
Eux, les chasseurs ont d’autres moyens pour leur chasse
Chiens, fusils et pièges de toutes sortes font
De grands carnages dans nos proies, c’est dégueulasse !
Ce serait à nous de nous plaindre pour de bon.
Nous sommes les vrais défenseurs de la nature
Car nous ne prélevons que selon nos besoins.
C’est, Monsieur le Préfet, du renard l’aventure,
Et j’espère pour notre espèce quelques soins.