Les belles sirènes

J’ai rêvé que j’aimais les belles sirènes
Leur buste de femme, leur queue de poisson,
Allongé près d’elles, goûtant le poison
De l’amour qu’exhalait leur fraîche haleine.
J’ai rêvé que j’étais aimé des sirènes
Et que je les aimais ces sombres beautés
Dont le chant invite au plaisir des baisers
Et piège le cœur même du dieu Silène.
Hélas dans les eaux je ne peux les poursuivre
Quand elles plongent dans l’océan amer
Et soudain le monde est vide et manque d’air,
Et la rive, pleine d’une tristesse ivre.
L’une d’elles particulièrement plut
À mon cœur. Ô mon amour à la dérive
Que m’importe tes amants des autres rives
Si tu reviens me dire : « Tu es l’élu.»
Simplement à nouveau me dire : « Je t’aime »,
M’offrir en cadeau un baiser de tes lèvres
Oh !, cela, c’est certain, guérirait mes fièvres,
Toi, dont les yeux s’allument comme des gemmes.
Me sertir dans la parole de tes bras
Avoir ta belle tête sur mon épaule
Et fouiller de mes yeux sombres les appâts
Que tu caches si bien, voilà un beau rôle.
Sur le théâtre de la vie il faut prendre
Ce qui nous arrive ; visage changé
D’un simple regard, l’âme doit se rendre,
L’amour prend résidence où règne Léthé.