Expo Hyacinthe Rigaud au château de Versailles (suite 7)

Publié le par Pi_ro_94

Louis XV par Rigaud

Rigaud peint trois fois le roi Louis XV

 

Louis XV enfant

Ce tableau qui a été commandé à Rigaud par le Régent juste après la mort de Louis XIV est le seul tableau royal où le modèle est assis. C'est sans doute en raison de l'âge du jeune roi, né en 1710 alors que son prédécesseur est mort en1715. C'est pourquoi il porte le sceptre de Henri IV  qui le rattache au Bourbon plutôt que l'épée Joyeuse de Charlemagne. On devine un fleuret qui pend le long de sa jambe gauche et la couronne dans l'ombre) droite du petit trône mais qui reste trop grand pour lui et l'oblige à poser les pieds sur un coussin bleu brodé de lys d'or. Les traits sont enfantins mais le geste est impérieux.

Louis XV, lors de ses fiançailles

Ce portrait es fait 5 ans plus tard lors des fiançailles de louis XV avec l'infante d'Espagne Marie Anne Victoire. Ces fiançailles seront rompus quelques années après et le roi sera marié à Marie Leszczinska, la fille de Stanislas Leszczynski,  ex roi de Pologne. Là encore il s'agit d'un marchandage diplomatique. Pour que cela puisse se faire, Stanislas renonce définitivement au trône de Pologne et reçoit en apanage et par compensation le duché de Lorraine et de Bar qui sont territoires d'Empire, territoires qui reviendront à la France à sa mort.

Portrait de Louis XV en grand costume royal.

Il est ici peint à 20 ans dans la même attitude que son bisaïeul  à la différence qu'il ne porte pas à son flanc l'épée Joyeuse et qu'il tient un autre emblème de la royauté française, le sceptre de Charles V le Sage. Ce qui semble assez approprié étant donné la situation financière du royaume à son avènement du fait des nombreuses guerres menées par Louis XIV. On sait que Charles V dont le règne clôt la première partie de la guerre de 100 ans réussi rétablir les finances du royaume et à récupérer les territoires perdus par ses prédécesseurs.

La statuette de Charlemagne surmontant le sceptre de Charles V
Rigaud " Le premier peintre de l'Europe".

C'est le célèbre mémorialiste le Duc de Saint-Simon, pourtant connu pour les portraits écrits de sa plume acérée,  qui a cette formule à propos de Hyacinthe Rigaud. En effet on se presse de tous les pays d'Europe pour se faire portraiturée par lui, princes allemands, italiens, espagnols portugais, polonais et même russes et anglais profitent d'un séjour en France pour se faire tirer le portrait par le maître catalan..

Suzanne Henriette d'Elbeuf duchesse de Mantoue

Suzanne Henriette appartient à la Maison de Lorraine et elle est duchesse de Mantoue par son mariage avec Charles III Ferdinand, dernier duc de Mantoue. Elle n'a que 17 ans quand elle épouse  en 1704 le duc qui en a 51 et cherche après son veuvage à assurer sa descendance tout en s'alliant à une autre famille ducale. Ils n'auront pas d'enfants et le duc mourra 4 ans plus tard en 1708. Suzanne revient en France et meurt en 1710 à même pas 24 ans

Portrait de la duchesse de Mantoue (détail)

Le duc de Saint-Simon a dit d'elle : " Elle est morte dans la fleur de sa jeunesse d'une longue maladie, après avoir été considéré comme une beauté, son "bizarre" mariage lui a donné une triste vie".

Charles III Ferdinand de Gonzague, duc de Mantoue

Charles III Ferdinand de Gonzague appartient à la famille des Nevers-Gonzague. Dans la guerre de succession d'Espagne il prend le parti français et reçoit le titre honorifique de général des armées françaises en Italie mais il perd en 1706, face aux troupes impériales menées par le prince Eugène de Savoie-Carignan. Suite à cela l'Empereur lui confisque son duché pour félonie et le déchoit de son titre de prince du Saint Empire. Il meurt 6 jours après sa déchéance sans descendance légitime  mais avec plusieurs enfants illégitimes.

Le dernier duc de Mantoue (détail)
Honoré III Grimaldi, marquis de Cagnes

Honoré III Grimaldi était prince héritier de Monaco, il le devint réellement en 1733. Né à Paris en 1720, il y meurt en 1795 dans son hôtel, la principauté de Monaco ayant été abolie en 1793 et rattaché à la République Française.. Elle sera rétablie en 1814 et son fils aîné en sera le nouveau prince souverain sous le nom d'Honoré IV.

Honoré III Grimaldi (détail)
Jan Andrzej comte de Morsztyn et sa fille Isabelle Catherine

Jan Andrzej de Morsztyn est un aristocrate polonais, grand trésorier de la Couronne et chef du parti français. Il est considéré comme le poète baroque le plus remarquable de son pays.

Accusé de trahison par le roi de Pologne Jan II Sobiewski qui avait noué des alliances avec l'Autriche, le comte de Morsztyn se réfugia à Montrouge après avoir vendu tous ses biens.  En France, il avait titre de Comte de Chateauvillain et devint même sujet français, ce qui indigna la noblesse française. Il est représenté ici  en compagnie de sa fille qui s'apprête à se marier avec le prince Kasimierz Czartoryski, duc de Klevan (aujourd'hui en Ukraine) et grand échanson du duché de Lituanie, c'est la raison pour laquelle elle cueille les fleurs d'un oranger, symbole de virginité et de noce. De l'autre côté au pied de son père un plan de pavot est figuré, discrète allusion à la mort récente de son épouse, une noble écossaise. Le comte meurt  un ans après l'exécution de son portrait.  Il a marié son fil à la fille du duc de Luynes et son autre fille à un autre magnat polonais.

Son œuvre poétique Luth comprend plus de 200 textes (sonnets, poèmes amoureux ou de circonstances, bagatelles) témoigne d'une grande maîtrise de l'art poétique, très influencé par le marinisme italien. Il est aussi le traducteur de Giambattista Marino et du Tasse et de plusieurs écrivains français : Pierre Corneille (sa traduction du Cid, contribua à introduire le classicisme en Pologne),  Charles Cotin ( aujourd'hui seulement connu comme ayant servi de modèle à Molière pour son Monsieur Trissotin des Femmes savantes), Vincent Voiture (assez oublié aujourd'hui, il fait parti des poètes précieux,). 

Portrait d'un jeune homme noir

On ne sait rien des circonstances qui ont conduit Rigaud à peindre ce chef-d'œuvre ni du jeune homme qui servit de modèle. L'esclavage étant prohibé en métropole jusqu'en 1716, le collier qu'il porte au cou ne dit donc rien de son statut réel. Par contre l'arc qu'il tien à la main et son turban à la turque renvoient au clichés d'un Orient fantasmé. On sait aussi que les turqueries ont été appréciées du temps du roi-soleil, voir Le bourgeois gentilhomme de Molière. 

La menaceuse

Ce tableau termine l'exposition et montre un autre Rigaud, plus dans le ton frivole et charmeur de ce 18ème siècle auquel il a appartenu pour plus de la moitié de sa vie. C'est le seul nu qu'on connaisse de lui, encore que " Cachez ce sein que je ne saurais voir" vient tout de suite à l'esprit en regardant ce tableau où un sein se laisse entrevoir.

Voilà j'espère que ce parcours à travers l'œuvre de Hyacinthe Rigaud vous aura plu, ce d'autant que nul passe sanitaire n'avez besoin. https://pi-ro-94.over-blog.com/2021/06/expo-hyacinthe-rigaud-au-chateau-de-versailles.htmlous pouvez la revoir depuis le début en cliquant sur le lien ci-dessous.

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B
jouait-il aux billes, cet enfant-roi ?
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P
Je ne sais pas. Ce qui est sûr c'est que les jeux de billes existaient depuis longtemps et le 18ème siècle est le moment où les billes deviennent parfaitement sphériques. Ensuite il faut être au moins deux pour jouer au billes. Alors avait il des petits camarades dans son entourage ? Peut être qu'un mémorialiste comme Saint-Simon ou un autre en a parlé. Vous pouvez tenter de les lires, celles de Saint-Simon font trois mille pages.
S
Je suis ébahie devant tes recherches
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P
Merci du compliment. Je ne l'ai pas fait pour tous les personnages rencontrés lors de cette expo. Il y a un peu de petite histoire mais on voit que même la vie de la noblesse n'était pas forcément idyllique en tout cas vu de notre point de vue d'aujourd'hui notamment pour les femmes. Ce qui ne laisse pas d'inquiéter pour les conditions de vie des classes populaires non représentées dans l'expo.
S
je révise l'histoire .. merci pour toutes ces richesses
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P
Ce n'est qu'une petite partie de l'histoire mais cela montre que le monde était déjà bien complexe et imbriqué. Je me suis servi à la fois de renseignements fournis par l'exposition avec des compléments trouvés sur le net (très souvent Wikipédia. J'ai remarqué à cette occasion qu'il y avait des contradictions entre certains articles concernant les personnages et leurs biographies. J'ai dû choisir d'après des éléments de date, par exemple une telle ne pouvait pas devenir la maitresse d'un tel alors qu'elle venait à peine de naître et pourtant c'est marqué noir sur blanc dans Wikipédia. En réalité c'était sa mère, comme indiqué dans un autre article consulté.