Un apéro en terrasse
Belle balade coutumière
Sous le ciel tout ensoleillé
De Paris, te voilà arrêtée
Dans ce Quatorzième magique
Et tu me laisses prendre le frais
En terrasse Rue Daguerre.
C’est que tu m’avais donné soif
Et ouvert un peu l’appétit
Et fatigué les jambes aussi.
Je suis assis caché dans un coin,
La soirée pétille dans le ciel bleu,
Un joli vent qui vous décoiffe
À peine mais soulève la nappe
En papier qui couvre les tables
Souffle puis se repose,
Lui aussi fatigué de faire
Ce même geste depuis le matin
Ici et partout dans Paris
Devant les premiers éveillés
Et les derniers attardés.
Je me suis arrêté là
Juste pour prendre l’apéro,
Connaissant bien le resto
Et j’attends le cocktail exotique
Et les amuse-gueules commandés :
Boudins créoles, samossa
Bouchons, c’est assez costaud
Je n’irai pas crier famine…
Après avoir englouti cela.
Tout arrive à qui sait attendre,
Je regarde donc la rue si connue
De ce coin où je ne me suis jamais calé.
Presque invisible de tous les clients
Je regarde les devantures des boutiques
En face de moi ; toutes fermées.
C’est le soir et le mois d’août
Il n’y a point de doute.
La rue est assez calme, quelques voitures
Qui s’arrêtent au feu rouge et repartent
Et les passants, plus nombreux eux,
Provinciaux, Parisiens ou étrangers,
En quête de leur bonheur de la soirée.
Enfin le cocktail arrive
Puis les tapas réunionnaises
Et un peu plus tard quand j’ai presque fini
Le patron qui connait mes goûts
M’en apporte une nouvelle
À ses frais va sans dire
C’est ainsi qu’on remercie
Les bons clients à Paris ;
Et me voilà reparti
Dans une autre rêverie.
A l’approche de 22 heures
Le ciel est devenu plus sombre
Et presque plus bleu sans le soleil
Et nourrit des seules lumières de la rue
Qui viennent tout juste de s’allumer ;
Soleils électriques précédant le sommeil.
Mon regard vogue sur les toits gris
Y rencontre une antenne qui semble
Un mat attaché par ses haubans,
Attendant quelque voile pour s’envoler
Avec la maison loin de Paris.
Les parfums des cuisines étrangères
Qui montent de la rue lui donnent
Des désirs de voyages lointains,
Elle veut voir l’Italie, le Maghreb, l’Inde,
La Chine, le Vietnam, la Thaïlande,
Et toutes les iles Mascareignes.
Et voilà toute la rue Daguerre
Voguant sur une mer imaginaire,
Abordant à des port irréels.
Et tous les parisiens habituels
Ou seulement de passage
De lever au ciel leur nez
Tout étonné :
« Mais qu’est-ce donc que ce paquebot
Qui s’en va en voyage
Dans le ciel nocturne
Courir tous les pays du monde ?»