Magie africaine
Des grands arbres, les fièvres tombent, lianes liquides
Qui plongent longs serpents lumineux dans le Zambèze.
Comment suis-je arrivé là voguant sur ces flots beiges
Dans cette pirogue noire où je m’éveille d’un rêve ?
Je prends les rames pour rallier la rive impavide.
Alors que je marche dans la sylve obscure et verte,
Fouillis d’arbres, de fleurs et d’angoissants parfums
Où tant d’animaux cachés guettent, yeux de félins,
Oiseaux, bêtes rampantes, insectes assassins,
Soudain elle s’éclaircit en une savane ouverte.
Je vois des cases au loin où un marché se tient.
Fruits exotiques, légumes inconnus, énormes,
Viandes de brousse, tête de buffle avec cornes,
Bourses d’impala mâle où les mouches bourdonnent
Et puis boubous, épices colorées, bijoux d’or fin.
Une belle femme, très probable magicienne
M’y attend et me hèle : « Viens donc, homme perdu,
Je vois que tu as soif, prends ceci ! » Alors j’ai bu
À son élixir, cette eau de coco et j’ai su
Que j’étais ensorcelé par l’aube africaine.
Elle avait sur l’épaule un petit oiseau tout noir,
Un collier de rubis, des boucles d’or aux oreilles,
Bracelets tintant ornés de pierres vermeilles.
Naïf, je luis demandais comment s’appelle-t-elle.
« Comme mon oiseau, Jénou ; cela veut dire soir. »
Je la contemplais bouche bée ; elle non gênée :
« Je vois que tu es plein d’une autre soif plus ardente
« Viens la nuit dans ma case, je serais ton amante.’
Puis elle s’évapora me laissant dans l’attente
Vertigineuse de ses caresses et baisers.