Réflexion autour du film All This Victory

Publié le par Pi_ro_94

Affiche du film

 

Je suis allé voir mercredi 15 janvier un film libanais  de Ahmad Ghossein qui porte un titre anglais All This Victory mais c’est une mauvaise traduction de l’arabe puisque le titre en arabe signifie « Le mur du son ».  Il était précédé de 2 courts métrages  de Jocelyne SAAB qui  sont des documentaires toujours sur des épisodes libanais de la guerre israélo-arabe qui dure depuis 1948.  Le premier se passe en 1976 et s’appelle Sud Liban, histoire d’un village assiégé et le Second se passe en 1982 et s’intitule  Les Libanais otage de leur ville.  Ils se déroulent donc à l’époque de la guerre civile libanaise qui commence en 1975 et se termine en 1990 et dans laquelle différentes puissances régionales sont intervenues, notamment  l’Iran, la Syrie et Israël, le tout dans le climat de la Guerre Froide entre les Etats-Unis et la Russie.  Les courts métrages n’explicitent pas trop le contexte global, il s’agit de monter plutôt comment les gens vivent  où ont vécu, l’épisode qui est raconté dans le documentaire. Le film, lui est une fiction mais inspiré de faits réels. Ils se déroule en partie à Beyrouth et dans le Sud-Liban. C’est un film Impressionnant où on ressent la guerre de l’intérieur et très intéressant à plus d’un titre.  Le film  qui est sorti en 2019 commence à Beyrouth pendant un cessez le feu, on voit une femme paniquée  qui téléphone en disant : « il est parti au Sud, chercher son père », elle rejoint  quelqu’un qui lui demande de se calmer et l’invite à venir chez lui pour ne pas rester seul après on voit l’homme qui est parti vers le Liban Sud chercher son père qui refuse obstinément de quitter son village près de la frontière sud. Avec sa femme qu’on a vu précédemment, il projette de s’expatrier au Canada en emmenant  sa femme et son père. Il est pris dans un embouteillage et demande si on peut passer  et on le voit changer de direction pour le retrouver sur une route ou se trouve des barrière formant chicane qu’il est obligé de contourné, on voit les paysages et les ponts et les infrastructures détruites et bombardées. Il arrive dans le village qui lui est quasiment détruit. Il arrête sa voiture et se précipite à travers les décombres vers la maison de son père qui est tout aussi détruite. Alors qu’il essaie de déblayer les décombres quelqu’un  l’interpelle : « Qui est là ?». C’est un autre vieux resté dans le village qui lui dit que son père est parti ce matin. Les bombardement reprennent et alors qu’il revient vers sa voiture, il se la fait voler par une femme avec des enfants qui fuient. Il est donc prisonnier du village avec le vieux et un autre dont la maison est restée debout et habitable miraculeusement. A partir de là cela devient quasiment à huis clos sauf qu’à un moment suite à un nouveau bombardement un autre couple, un autre vieux et une femme plus jeune accourent se réfugier aussi dans la maison. Il y a aussi deux trois scènes qui se passent à Beyrouth.  Dans la maison close les cinq personnes vivent ensemble comme ils peuvent entre angoisse et espoir presque sans eau et très peu de nourriture avec la guerre qui tournent à l’extérieur, ils n’en ont plus que les sons effrayants, bombardements, tirs des combats entre Israéliens et combattants du Hezbollah survol des avions franchissant le mur du son et puis des soldats israéliens s’installent au-dessus de leurs têtes au premier étage dont ils entendent les conversation. L’un des vieux comprend l’hébreux et donc explique aux autres ce que font ses soldats au-dessus.

Les cinq personnages enfermés dans le rez-de-chaussée de la maison,

On ne voit l'extérieur que rarement et à travers la fenêtre ou la porte entrebâillée, Il reste la radio qu'ils écoutent parfois. On ne voit jamais les combattants qu'ils soient Israéliens ou du Hezbollah.  

Mon impression c’est que dans le film la raison  de cet épisode de guerre n’est pas expliqué on ne sait pas trop pourquoi tous ces bombardements de destructions et d’ailleurs les protagonistes enfermées dans la maison ne le comprennent pas non plus vraiment.  À mon avis ils savent très bien ce qui motivent l’intervention, même si ce n’est jamais dit dans le film mais ne savent pas pourquoi ça dure et ça s’étend. Comme je ne connaissais pas cet épisode de 2006 je me suis renseigné après coup. C’est le principal problème du film d’ailleurs, qu’il faut aller chercher en dehors de lui ce qui permet de comprendre ce qu’il se passe. C'est un parti pris du cinéaste pour nous mettre dans la peau des Libanais. Le problème c’est que  le spectateur non Libanais que nous sommes comprends encore moins qu’eux

Dans les faits c’est le Hezbollah qui a attaqué Israël, tué huit soldats et enlevé deux autres. Ils s’attendaient donc à une réplique israélienne mais pas aussi violente et sans faire de distinction entre civils et combattants. D’ailleurs à l’intérieur même de la société Israélienne cela avait été incompris et on avait accusé l’armée d’impréparation et d’avoir fait n’importe quoi alors qu’en réalité c’était un plan préparé et une nouvelle doctrine militaire. En gros l’idée était la suivante puisque les combattants se planquent parmi les civils et bien on les attaque où ils sont planqués et tant pis pour les civils présents au moment de la réplique. C’est illégal évidemment en regard du droit international. Qui dit qu’il faut distinguer entre combattants et civils L’autre idée de la nouvelle doctrine c’est la disproportion. C’est pourquoi cette guerre de Juillet  2006 est un point de bascule historique dans ce conflit  On voit aujourd’hui ce que l’application féroce  de cette doctrine après l’attentat tout aussi terrible perpétré par le Hamas a donné.

Il y a plusieurs scènes et plans dans le film qui montre l’irrationalité et le mysticisme religieux  qui imprègnent le conflit dont une très belle, mystérieuse et inquiétante qui imprègne ce conflit de part et d’autre.  En tout cas c’est comme ça que je les ai perçues.

Du fait même qu’il y a un aspect religieux qui sous-tend le conflit, la mystique religieuse  l’a très probablement toujours imprégné mais elle ne dominait pas. Aujourd’hui il semble qu’elle est devenue dominante.

C’est pourquoi les raisonnements rationnels, le recours au droit international, les accusations de crime de guerre, de génocide n’opèrent pas, les protagonistes s’en foutent presque  complètement. Il y a plus qu’un territoire en jeu à mon avis. C’est presque devenu annexe en tout cas pour des Libanais. Les Israéliens ne revendiquant aucun territoire au Liban. Ils ne veulent que ne pas être attaqués à partir du Liban

Le problème c’est que cette nouvelle doctrine  fonctionne à l’inverse de ce qu’ils croyaient, c’est-à-dire provoquer une révolte dans la population contre les groupes armés, terroristes ou résistants suivant le point de vue qu’on adopte.  En vrai le Hezbollah n’est pas un groupe de résistants, tout au plus un groupe de partisans de la cause palestinienne mais ce n’est pas cela à l’origine, à l’origine c’est une milice confessionnelle chiite libanaise défendant la communauté chiite du Liban comme il y en avait des dizaines durant la guerre civile.

En y réfléchissant je pense que cette phase mystique  et irrationnelle du conflit commence à l’assassinat d’Issac Rabin.

C’est tout cela qui rend compliqué la résolution du conflit et que celui-ci s’éternise. Comment faire pour que tous les protagonistes redeviennent raisonnables et rationnels ?  Pour l’instant la communauté internationale emploie la menace et la négociation. Cela a abouti pour l’instant a deux cessez-le-feu provisoires comme il y en déjà eu de nombreux avec malheureusement tellement de dégâts et de morts avant.

Il y a eu de tels excès de part et d’autre, chacun campant sur des positions extrémistes et ne voulant rien céder sur leur droits à cette terre je suis pessimiste et ce film n’est pas fait pour le diminuer.

Il y avait après le film une rencontre animé par Lola Maupas avec un cinéaste libanais.  J’ai déjà assisté a plusieurs  de ces rencontre après film et d’habitude il y a toujours des personnes du public  qui interviennent. Mais là personne n’a voulu prendre la parole. C’était avant qu’il y ait un cessez-le-feu à Gaza. Peut-être qu’en repassant ce film maintenant la parole se libérerait plus facilement.

Le titre français de All This Victory

 

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S
je reproduis mon commentaire qui a du s'envoler vers d'autres cieux... quand est ce que les hommes mettront leur intelligence au profit de la paix? toutes ces guerres soi disant de religions font tant de morts inutiles. Parfois, je n'y comprends rien ..j'ai une amie qui habite au Liban, ce si beau pays dévasté depuis tant d'années.. tellement affligeant !
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P
Il ne s'est pas envolé mais j'ai dû oublier de valider ma réponse. C'est une histoire longue à raconter mais le Liban a non seulement été victime de ses voisins pas seulement les Israéliens mais de toutes les factions intérieures soutenues justement par ses voisins et jusqu'à l'Iran qui n' a aucune frontière avec lui sous fond de conflit avec Israël et de Guerre Froide entre les USA et L'URSS. Ce qui est curieux c'est que celui qui a fait basculer le vote en faveur de la création d'un état juif et d'un état arabe lors de l'examen de la résolution 181 de l'ONU en 47 c'est Staline. Les Américains n'étaient pas chauds, la France avait plutôt l''intention de s'abstenir, le vote n'était pas du tout acquis puisque tous les pays arabes étaient contre et les pays musulmans aussi. Il faut savoir que les pays arabes recevaient leurs armes de l'URSS par l'intermédiaire de la Tchécoslovaquie et que Staline a brusquement changé cela et a demandé à la Tchécoslovaquie de fournir en armes les milices juives et de couper les livraisons aux Arabes. Cela a complètement changer le résultat de la première guerre Israélo-arabe de 1948. L'amour soudain de Staline pour les Juifs n'a pas duré longtemps mais cela a été suffisant pour qu'Israël maintienne son existence. Après ce sont les la France, l'Angleterre et les USA qui on pris le relais des Russes dans l'aide militaire à Israël. Je ne sais pas pourquoi les Arabes et l'Iran font une fixette sur Israël, comme s'ils n'avaient pas d'autres problèmes à régler chez-eux
E
Tu as écrit une belle chronique de ce film qui ne metente pas trop
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P
Le film est vraiment prenant et en même temps cela ne doit pas être facile de filmer au Liban mais <br /> je comprends qu'on ai pas envie de voir ce genre de film. Je ne suis pas sûr qu'il passe par chez-toi. Là il était distribué dans le cadre du "Décolonial Festival Films"
S
je ne sais si ces guerres s'arrêteront un jour, les hommes mettent leur intelligence au profit de conflits religieux et autres, des situations si sombres et difficiles à comprendre.
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