Beauté du soir
Tandis que je la cherchais dans un livre,
La beauté m’est apparue soudain dehors.
J’avais un instant détourné mes yeux ivres
De mots lus sur le papier et, comme on sort
D’un songe, j’ai vu changer le paysage.
J’avais passé le fin voile des rideaux
Et celui des obsessions, et tel un sage
Je contemplais le ciel, ce libre préau,
Qu’éternellement les grands arbres soutiennent
Et que l’oiseau habite et chante le jour.
Je le vis ainsi passer d’un bleu à peine
Dessiné à un gris léger ; un jour sourd
Entra par les fenêtres, douce pénombre,
C’était le soir qui sans façon s’invitait.
Heure précieuse où la vie sans encombre
Applaudit ceux dont on ne se souciait
Avant que ne s’installe l’épidémie.
Ce joindre à ce concert qui vibre partout
Dans l’air libère des heures asservies ;
Heureux de ce tintamarre quelque peu fou,
Hommage bref et rituel aux soignants,
Que nous faisons sur nos balcons à vingt heure,
Et puis encore partage bienfaisant,
Désir que la maladie ne soit vainqueure.